Charles ANGRAND
une Oeuvre, une Histoire par Brice Aurpeuthy et Jacba
QUI : Charles ANGRAND (1854-1926)
QUAND : 1881
QU’ EST-CE : Le gardeur de dindons (huile sur toile, coll. part.)
COMMENT : Ce sujet rupestre reste classique, déjà étudié
par maintes générations de peintres. Et il est évident que l’intérêt de l’œuvre
réside uniquement dans sa composition.
En effet, Charles Angrand montre une grande
modernité : composition frontale, sans point de fuite. Gauguin, quelques
années plus tard, en initiera son groupe à Pont-Aven.
La source en est la découverte des estampes
japonaises, qui sont construites sans modelé, sans perspective atmosphérique
chère aux artistes européens. Qu’un rendu plaisant et décoratif, car il faut
rappeler que les estampes ne servaient à l’origine, que de papier d’emballage !
Or, les peintres impressionnistes, Claude Monet le premier dans sa maison de
Giverny, furent séduits et collectionnèrent ces estampes, dont la galerie
Siegfried Bing à Paris s’en fit la spécialité.
Ici, prime un fond jaune bouton d’or, façon
icône mettant en valeur un sujet bucolique sans prétention, égrainé de touches
vert prairie. Et construit, maçonné pourrait-on dire, en touches horizontales à
la brosse. La même largeur de brosse habille les dindons d’un gris nuancé de
bleu. De plus, les volatiles se retrouvent rejetés dans le coin supérieur du
tableau, comme l’aurait fait un photographe.
Le spectateur semble épier le jeune garçon
dans son activité de « gardeur ». Il est de dos, une branchette à la
main. Même si il en est le titre, il n’est pas le sujet, ni même les
gallinacés : la composition surpasse le sujet !
Ainsi en a voulu Charles Angrand.
Brice Aurpeuthy
L'environnement du peintre en 1881
Politique française
L’évènement politique
majeur de cette année 1881 est indubitablement la loi votée le 16 juin par les
Chambres à l’initiative de Jules Ferry, Ministre de l’Instruction Publique,
instituant dans son article premier, « qu’il ne sera plus perçu de
rétribution scolaire dans les écoles primaires publiques ». Mais,
c’est en 1882 que « l’instruction primaire est rendue obligatoire pour
les enfants âgés de 6 ans à 13 ans révolus »…
L’article 2 de la Loi
de mars 1882 stipule que « les écoles primaires publiques vaqueront un
jour par semaine, en outre du dimanche, afin de permettre aux parents de faire
donner, s’ils le désirent, à leurs enfants, l’instruction religieuse en dehors
des édifices scolaires ».
Dans son article 6, la
Loi « institue un certificat d’études primaires ».
Medecine
Louis Pasteur explique dans une communication le principe d’action
de la vaccination, suite aux travaux de Robert Koch mettant en relation les
microbes et les maladies. Sa première vaccination fut celle d’un troupeau de
moutons contre le charbon le 5 mai 1881. Mais, ce n’est qu’en 1885 qu’un enfant
fut traité contre la rage par vaccin après exposition au risque.
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Si vous souhaitez transformer quelqu’un de paisible en un démon hurlant, saisissez-le amicalement, mais fermement, par son bras récemment vacciné ! |
Peinture
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Claude PISSARRO - jeune paysanne prenant son café - HST 64x54 - 1881 - Art Institute Chicago |
Si l’année 1881 voit le mouvement impressionnisme s’épanouir avec des œuvres comme « le déjeuner des canotiers » ou « sur la terrasse » de Pierre-Auguste Renoir, « le chasseur de Lions » d’Edouard Manet, ou « Susan consolant un bébé » de Mary Cassatt, ou bien encore « jeune paysanne prenant son café » de Camille Pissarro, on assiste en revanche au développement d’une génération anti-impressionniste avec Pierre Puvis de Chavannes (« le pauvre pêcheur »), Odilon Redon (« yeux clos ») ou Gustave Moreau très inspiré de mythologies raffinées.
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Pierre PUVIS DE CHAVANNES - le pauvre pécheur - HST 155x192 1881 - Musée d'Orsay |
Ce nouvel art pictural, né en 1870, s’ingénie à traiter par des
représentations symboliques le caché, l’ailleurs, l’invisible, à travers la
nature, le rêve et la méditation sans oublier la femme éternelle.
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Odilon REDON - les yeux clos - HST 44x36 -1890 - Musée d'Orsay |
JACBA